révolte du papier timbré

dite aussi révolte des bonnets rouges

 

la Bretagne est une province privilégiée, où l’impôt sur le sel, la gabelle, n'existe pas mais sous le règne de louis XIV, les années 1674 et  1675 connaissent  une importante révolte antifiscale qui toucha toutes les villes et campagnes ( elle est dite aussi révolte des bonnets rouges en raison de la couleur des couvre-chefs de certains paysans ou du papier timbré).

La révolte du papier timbré fut l’une des plus sanglante de l’histoire de la Bretagne, Colbert en 1673 veut lever de nouveaux impôts la gabelle ;  le papier qui permet de taxer tous les documents officiels pas d’exception pour les actes d’état civil, mariages,  testaments,  acte notariés,  etc… et tout cela pour soutenir les efforts de guerre et les grands travaux. La Bretagne connaît une récession économique intense. Face à la baisse des prix, les seigneurs exigent encore et encore de leurs fermiers leurs droits en natures et pécuniaires. A la même

période, une nouvelle taxe sur tous les objets en étain qui mécontente les paysans aisés et les cabaretiers (personne qui servait du vin au détail et donnait à manger contre de l'argent) ;  bien entendu il répercute aussitôt  les taxes avec une forte hausse sur les prix des consommations. En Septembre 1674, la vente du tabac est réservée exclusivement au roi qui prélève une taxe et en afferme la vente. Les personnes autorisées à revendre le tabac (fermiers et commis) rachètent les stocks aux commerçants qui en vendaient auparavant. La réorganisation des circuits de vente entraîne une interruption temporaire de la distribution de tabac ( à fumer et à chiquer ), d’où une autre source de mécontentement, ce qui procure la haine des Bretons  et qui  les poussent vers une révolte sanglante.

En Bretagne les émeutes urbaines éclatent : les bureaux de papier timbré ou de marquage de vaisselle en étain ²sont pillés et mis à sac ;  un premier soulèvement a lieu à Rennes le 3 avril quand les habitants apprennent qu’une révolte éclate au sujet de la vente du tabac et du marquage de l’étain ; ce jour là seul quelques bris de verre aux fenêtres et jets de pierres ;  mais le 18 avril à Rennes éclate une nouvelle émeute ;  ils s’en prennent à plusieurs immeubles ou ils pénètrent et pillent,  le vin,  cidre,  et tout le tabac et brûlent les cahiers des registres du greffe. Ensuite direction le parlement où ils détruisent les presses et pillent tout le papier et parchemin timbré ;  cette série d’émeutes et de pillages a fait une dizaine de morts et une cinquantaine de blessés ;

du 8 au 12 juin de nombreux mouvements ébranlent encore la ville. Dans ses rapports au roi, le gouverneur de la Bretagne le duc de Chaulnes, met fortement en cause le parlement qu’il accuse de pousser le peuple aux révoltes contre les édits royaux et estime à environ 15 000 hommes qui ont pris les armes et participés activement aux émeutes.

Mi –juillet, une seconde fois,  le parlement est pillé de ses papiers timbrés.

St Malo fut assez calme « les terre-neuvas » MALOUINS étaient partis, ou sur le départ des bans de morues à Terre-Neuve.

Dans le Finistère,  le tocsin sonne dans plusieurs communes aux environs de Briec et les émeutiers s’en prennent aux nobles,  les blessent,  pillent et brûlent leurs maisons.

En basse Bretagne la révolte gronde également et ils  s’en prennent aux agents, aux prêtres suppôts de la gabelle. Dans le pays du Poher,  les villes non fortifiées sont attaquées et pillées ; cette série de pillages est commandée dans cette région par un notaire dénommé Sébastien le Balp ; avec plus de 600 bonnets rouges,  le château de Tymeur est pillé de toutes ses archives et papiers qu’ils brûlent ;  le 3 septembre,  l’investigateur Sébastien est tué par le marquis de Montgaillard .   Ils sont  faits prisonniers ce qui met fin à la rébellion dans cette région.

Louis XIV met à la disposition du duc de Chaulnes, en août,  6 000 hommes de troupe et s’en suit les exécutions. Les communautés villageoises sont sommées de livrer les meneurs sous peine de représailles collectives ;  les cloches ayant sonné le tocsin sont déposées et plusieurs églises sont décapitées avec interdiction de les remonter. Les principaux responsables sont envoyés devant une commission extraordinaire du parlement ; les présidiaux pouvant juger exceptionnellement en dernier ressort ; ce qui aboutit à de rapides condamnations à mort. Dès octobre 1676, des condamnations aux galères et à la peine de mort sont prononcées envers les responsables.

   Le 12 octobre, le duc de Chaulnes entre à Rennes, avec 6 000 hommes, logés chez l’habitant.

La Bretagne doit subvenir entièrement aux besoins des troupes de répression, puis d’une armée de 20 000 hommes (ce dernier point en représailles aux doléances des États de novembre 1675).

Un privilège violé

Le 3 mai, à Nantes, le marquis de Molac, gouverneur de la ville, décrit dans une lettre « l'émotion populaire » comme l'une « des plus grandes et des plus considérables qui se soient jamais faites dans la ville ». Le roi réagit et y envoie des troupes armées, violant l'un des privilèges de la ville qui l'exemptait du logement des gens de guerre. Une nouvelle flambée de colère éclate, marquée par le siège du manoir épiscopal où se trouvait alors le duc de Chaulnes, gouverneur de Bretagne. Lorsque les troupes se retirent, l'atmosphère s'apaise un peu.

Le parlement en exil

Outre la réduction au silence des États et du Parlement, la reprise en main permet l'établissement d'une intendance de Bretagne. La Bretagne était jusqu'à présent la dernière province à ne pas connaître cette institution représentante du pouvoir central. Le parlement de Bretagne est exilé à Vannes pendant une vingtaine d'années, Louis XIV suspectant les parlementaires de ne pas avoir fait   assez pour empêcher le développement de la révolte.

 

Le code paysan

1.    Que lesdites 14 paroisses, unies ensemble pour la liberté de la province, députeront 6 des plus notables de leurs paroisses aux Etats prochains pour déduire les raisons de leur soulèvement, lesquels seront défrayés aux dépends de leurs communautés qui leur fourniront à chacun un bonnet et une camisole rouges, un haut-de-chausses bleu avec la veste et le reste de l'équipage convenable à leur qualité.

2.    Qu'ils mettront les armes bas et cesseront tout acte d'autorité jusqu'aux dits temps par une grâce spéciale qu'ils font aux gentilshommes, qu'ils feront sommer de retourner dans leurs maisons de campagne au plus tôt, faute de quoi ils seront déchûts de ladite grâce.

3.    Que défense soit faite de sonner le tocsin et de faire assemblée d'hommes armés sans le consentement universel de ladite union, à peine aux délinquants d'être pendus aux clochers.

4.    Que les droits de champart et corvée prétendus par lesdits gentilshommes seront abolis comme violation de la liberté armorique.

5.    Que pour confirmer la paix et la concorde entre gentilshommes et nobles habitants desdites paroisses, il se fera des mariages entre eux, à condition que les filles nobles choisiront leur maris de condition commune, qu'elles anobliront et leur postérité, qui partagera également les biens de leurs successions.

6.    Il est défendu, à peine d'être passé par la fourche, de donner retraite à la Gabelle et à ses enfants, et de leur fournir ni à manger ni aucune commodité, mais au contraire, il est enjoint de tirer sur elle comme sur chien enragé.

7.    Qu'il ne se lèvera pour tout droit, que 100 sols par barrique de vins horet et un écu pour celui du cru de la province, à condition que les hôtes et cabaretiers ne pourront vendre l'un que 5 sols et l'autre 3 sols la pinte.

8.    Que l'argent des fouages anciens sera employé pour acheter du tabac qui sera distribué avec le pain béni, aux messes paroissiales, pour la satisfaction des paroissiens.

9.    Que les recteurs, curés et prêtres seront gagés pour le service de leurs paroissiens sans qu'ils puissent prétendre aucun droits de dîme, novale, ni autre salaire pour leurs fonctions curiales.

10.                     Que la justice sera exercée par des gens capables, choisis par les nobles habitants, qui seront gagés ainsi que leurs greffiers sans qu'ils puissent prétendre rien des parties pour leur vacations et que le papier timbré sera en exécration à eux et à leur postérité pour ce que tous les actes qui ont été passés seront écrits en autre papiers et seront par après brûlés pour en effacer complètement la mémoire.

11.                     Que la chasse sera défendue à qui que ce soit depuis le premier jour de mars jusqu'à la mi-septembre. et que fuies et colombiers seront rasés, et permis de tirer sur les pigeons en campagne.

12.                     Qu'il sera loisible d'aller au moulin que l'on voudra et que les meuniers seront contraints de rendre la farine au poids du blé.

13.                     Que la ville de Quimper et autres adjacentes seront contraintes par la force d'approuver et ratifier le présent règlement, à peine d'être déclarées ennemis de la liberté armorique, et les habitants punis où ils seront rencontrés; défense de leur porter aucune denrée ni marchandise jusqu'à ce qu'ils aient satisfait, sous peine de torreben.

14.                     Que le présent règlement sera lu et publié aux prônes des grands messes et par tous les carrefours et aux paroisses et affixé aux croix qui seront posées.

Signé: Torreben et les habitants»